Attendu depuis un certain temps, et d'ailleurs réalisé avant
A Dangerous man du même réalisateur,
The Keeper aka
Sous Haute protection était censé remettre Steven Seagal sur les rails du succès mais finira, comme ses précédents films ces 10 dernières années (du moins jusqu'à
Machete), en DTV. Loin d'être un bon film mais aussi loin d'être un nanar,
The Keeper est à placer dans les opus honorables dans la carrière en DTV du père Seagal, qui nous fait ici son
Man on fire à lui.
Steven Seagal est Roland Sallinger, un flic de L.A. intègre, ce pourquoi son collègue le trahit et le laisse pour mort (ce qui était déjà arrivé à Steven dans le lointain
Echec et mort) afin de partir avec le butin d'une descente chez les dealers. S'étant prit une balle (ce qui reste une exception dans sa filmo), Steven se réveille à l'hôpital, bute tranquillement son traitre de collègue qui venait l'achever et n'aura finalement pas fait long feu puis se casse, parce que les hôpitaux c'est pas son kiffe. Cette histoire de trahison n'aura aucune incidence sur le reste de l'histoire, si ce n'est que Steven, se rééduquant à sa façon (s'entrainer au lancé de couteaux ou chouchouter sa collection de guns, par exemple), ne peut plus exercer son métier de flic. Il est contacté par son vieil ami (excellent Steph DuVall, le papa de Clea DuVall), un riche propriétaire qui lui demande de venir le rejoindre au Texas pour officier en tant que garde du corps de sa fille (la jeune & jolie Liezl Carstens, déjà seagalisée dans le très fun
Urban Justice), en couple avec une jeune star de la boxe (Arron Shiver, vu dans
21 grammes, Les Disparues, 3h10 pour Yuma, Dans La Vallée d’Elah, Sunshine cleaning, Les Chèvres du Pentagone, Brothers, Le Livre d’Eli et
Kung-Fu Nanny, rien que ça). Il faut dire qu'au Texas et au Mexique, le kidnapping et meurtre de célébrités et de gens fortunés est très répandu, et que le couple vient de subir une tentative d'assassinat, qui a laissé sur le carreau leur précédent garde du corps. Steven va donc piquer le Stetson de Walker Texas Ranger et protéger la jeune femme qui, on s'en doute, s'attache au saumon agile, l'emmène en boite de nuit, lui fait des blagues, l'allume un peu, etc. Ce dernier, dans toute son intégrité, se refuse de céder aux avances («
Vous n'aimez pas les femmes ? », lui demande-t-elle) de la fille de son ami, préférant le statut d'ange-gardien, de conseiller intime et, surtout, de casseur de gueules, parce que comme il le précise, le baby-sitting c'est pas son truc. On passe donc à coté du
Bodyguard de Steven Seagal, encore plus lorsque la fille se fait kidnapper malgré la vigilance de Steven. Tel Denzel Washington dans
Man on fire, notre héros est bien décidé à retrouver/venger sa protégée et à botter le cul aux vilains.
Toujours en mode gros bouffi, Steven fait cependant de remarquables efforts dans ce
The Keeper, un peu comme dans l'excellent
Le Prix du Sang en 2009. Tout d'abord, Steven n'est jamais plongé dans la pénombre (la tonalité du film est lumineuse) et se passe autant que possible de doublure, aussi bien dans les gunfights que dans les bagarres. Il faut dire que
The Keeper est moins généreux en action que d'autres de ses DTV, mais les scènes d'action n'en sont que plus efficaces, soignées et fulgurantes, de l'assaut sec et violent du début (Steven descend du dealer à coups de shotgun) au climax bourrin (un peu comme dans celui de
A Dangerous Man) avec grosse fusillade (dont Steven qui trucide des cibles avec le fusil sniper Barrett M82 de
John Rambo,
Shooter tireur d'élite et
Mi$e à prix !) et baston barbare contre un bad guy impuissant (il ne touche pas une fois Steven !) et achevé par un finish him corsé (Steven se sert de sa main comme d'un couteau pour transpercer la gorge de son ennemi !). Entre les deux, une course-poursuite-gunfight bien troussée, un mano-a-mano 100% Steven contre le pauvre latino dans la villa (très bonne baston même si trop vite expédiée, comme toujours avec Steven), et d'autres humiliations seagaliennes jouissives (la baston dans la boite de nuit, Steven qui tombe sur des emmerdeurs dés qu'il débarque au Texas et leur fait bien comprendre qu'il faudra à l'avenir éviter de le provoquer, une leçon que les méchants n'ont jamais l'air de retenir). Bourreau bourrin, esthète du cassage de membres, Steven Seagal est toujours aussi énervé et impitoyable : sourire narquois et assurance à toute épreuve frôlant l'arrogance face à des ennemis qui n'arrivent jamais à le toucher, bris d'os régulier et prises douloureuses, mises à mort sadiques, humiliations tordantes (mdr le retour de ses grosses baffes) et coolatitude décalée, soit la marque de fabrique de Steven, bien présente dans cet opus satisfaisant de ce point de vue-là. Cette brute de Steven se fighte au quart de tour et c’est tant mieux, même si on l'a vu plus badass et cruel dans
Killing point,
Le Prix du sang,
Urban Justice ou
A Dangerous Man, pour ne citer que les DTV. Par ailleurs, dans ce rôle de keeper bien sapé, Steven retrouve une certaine classe, une prestance plus élégante que vulgaire, un peu comme dans
Le Prix du sang, pour lequel il avait perdu du poids (mais il semble en avoir repris entre-temps). Il a également plus de dialogues que d'ordinaire, notamment dans une jolie scène de confession avec la jeune femme qu'il protège.
Moins d'action et un scénario bien plus solide que dans les précédents DTV de Seagal, c'est la particularité de
The Keeper, qui n'en reste pas moins truffé d'invraisemblances et de facilités. Mais aussi banale soit-elle, cette histoire de kidnapping et de vengeance maintient l'attention en évitant de s'attarder sur une quelconque sous-intrigue. De plus,
The Keeper prend place dans un contexte intéressant, proche du bon
Trafic Mortel avec Van Damme : un Texas gangréné par les mexicains en situation irrégulière et donc par la criminalité. Le scénario évoque notamment un phénomène très répandu là-bas et déjà exploité dans le
Man on fire de Tony Scott, à savoir le rapt. En kidnappant la fille du riche propriétaire, les ravisseurs cherchent ici à obtenir un territoire contenant non pas du pétrole, mais du minerai d'uranium. Les personnages (le vieil ami de Steven, la fille, le jeune salaud, le méchant...) ont le mérite d'être plus fouillés et mieux interprétés que d'habitude, y compris celui de Steven, ce qui ne les empêche pas d'en rester aux stéréotypes (les méchants ont des sales gueules et beuglent plein de «
fils de pute », comme dans
Urban Justice). Même au niveau des dialogues, le film se tient. Les quelques scènes entre Steven et la fille sont même assez mignonnes, d'autant plus que ce grand séducteur de Steven s'abstient de la niquer et fait plutôt preuve d’une tendresse paternaliste comme avec sa nièce de
Piège à grande vitesse ou sa fille dans
Jeu Fatal.
Si les premières minutes ne sont pas rassurantes, usant abusivement de ralenti-accélérés sur une musique techno mollassone, la suite est plus emballante, dés le montage alterné entre l'entrainement de Steven et la présentation des autres personnages au Texas. La réalisation de Keoni Waxman (un bon artisan du bis qui a notamment à son actif
Serial Bomber avec Lori Petty,
Hunt to kill avec Steve Austin et Gary Daniels,
Sweepers avec Dolph Lundgren, ou même un bopic sur Anna Nicole Smith), qui avait déjà dirigé Steven dans le bancal
A Dangerous Man, est assez élégante, le montage sobre, la photo clean, et
The Keeper est nettement moins clipesque que la plupart des précédents DTV avec Steven, y compris
A Dangerous Man. Le décor naturel (c’est tourné au Nouveau-Mexique) et la bande-son latino apportent un certain charme. Comme dans
Killing point,
Le Prix du sang ou
A Dangerous Man,
The Keeper contient quelques inserts hardcore sur les dommages infligés aux victimes de Steven.
Relativement bien troussé et bien écrit,
The Keeper est un produit de bonne facture qui permet à Steven Seagal de rehausser le niveau.
6 / 10