On attendait beaucoup de Steven Seagal après le relativement bon
Le Prix du sang, ce pourquoi
A Dangerous man sonne comme une petite déception. Ca commençait pourtant sur un générique très fun qui change un peu. De nouveau gros, Steven incarne encore une fois un ancien des Forces Spéciales et a remit son bandana préféré depuis
Mission Alcatraz, ce qui n'annonce rien de bien original pour la suite. Après avoir passé 14 ans à l'Armée, Steven est accusé à tort d'un meurtre et passe de longues années en prison, de laquelle il aurait pu s'évader aussi facilement que dans
Mission Alcatraz ou
Today you die. Au bout de 6 ans, Steven est innocenté, mais malgré l'argent reçu en compensation il a perdu de nombreuses années de sa vie. Cette back-story bazardée dans les premières minutes ne sert à rien d'autre qu'à justifier le comportement violent d'un Steven toujours aussi vénère, ce qui nous vaut notamment un grand classique des films de Steven : alors qu'il va s'acheter tranquillement une teille de sky chez l'épicier du coin, on se doute bien que quelques lascars de passage auront la mauvaise idée de taquiner Steven, qui ne pourra décidément jamais faire ses courses en paix. Malgré ses avertissements polis («
Si tu continues, je vais te déchirer la gueule »), notre gros bonhomme devra leur donner une leçon de bonne conduite. Mais les deux cailleras, qui sont au mauvais endroit au mauvais moment, n'auraient peut-être pas mérité un châtiment aussi sévère que celui que leur inflige Steven, qui semble les avoir choisis pour se défouler un bon coup, donne ici un nouveau sens à l'expression «
déchirer la gueule » et offre une utilisation originale de son flingue.
Après ce tabassage aussi ultra-violent que totalement gratuit, Steven se casse comme si de rien n'était en piquant la bagnole des deux jeunes hommes qu'il vient de trucider en pleine rue. On se dit que ce
A dangerous man va être un Seagal grand cru. Alors qu'il est sagement en train de picoler seul sur un ponton en repensant à sa défunte nana (des flashbacks hilarants montrant une poufiasse chevaucher seins nus un Steven habillé et en mode lover), tel un rocher pensif, Steven est témoin d'un double meurtre sur un parking. Toujours au mauvais endroit et au mauvais moment tel un John McClane du pauvre, Steven intervient pour corriger furieusement les deux chinois et en massacre littéralement un. Notre héros s'enfuit avec leur bagnole en amenant avec lui un jeune témoin de la scène (qui n’en a rien à cirer que son pote se soit fait descendre) et une nana que les chinois s'apprêtaient à tuer pour d'obscures raisons que Steven ne tardera pas à découvrir en secouant la jolie demoiselle (Marlaina Mah, aperçue brièvement dans
Les 4 Fantastiques). Avec des flics pourris aux trousses, Steven va ainsi se retrouver malgré lui au milieu d'une guerre entre des chinois et des russes (Steven n'aime guère les cocos). Steven ayant sympathisé avec ces derniers dans
Le Pacte du sang, il se range de leur coté avec le charismatique Vitaly Kravchenko (
Les Chroniques de Riddick, L’imaginarium du Dr. Parnassus) pour affronter les méchants chinois (dont le Terry Chen de
Rogue, L’Agence tout risques, Des Serpents dans l’avion, Chaos, Romeo doit mourir, Presque célèbre, Les Chroniques de Riddick et
I, Robot) menés par « le colonel » joué par l'excellent Byron Mann, le mentor de Mark Dacascos dans
Crying Freeman, le bad guy du
Corrupteur, l’avocat de Richard Gere dans
Red Corner et Ryu dans le
Street fighter avec Van Damme.
On peut se demander quelles sont les raisons qui justifient l'ultra-violence dont a toujours fait preuve Steven, s'il a eu des problèmes dans la vie, pourquoi son personnage se défoule autant sur les méchants même quand ils sont quasiment morts, d'ou lui vient cette obstination. Reste que ces nobles intentions nous offrent des combats badass ou l'invincible et impitoyable Steven ne prend aucun coup, casse des os en pagaille, trucide ses adversaires avec différentes armes (dont une baguette chinoise qu'il semble jubiler à enfoncer lentement dans le cou d'un chinois) et les envois valser dans le décor comme les pantins qu'ils deviennent face à Steven, qui se complait dans l'humiliation et le sadisme même si l'on atteint pas le niveau d'un
Justice Sauvage, d'un
Désigné pour mourir ou d'un
Killing Point. Dommage que certaines bastons et fusillades soient montées chaotiquement (difficile de discerner ce qu'il se passe pendant la scène du parking), mais certains plans laissent bien le temps d'admirer le vrai Steven dans son art comme dans le bon vieux temps. Bien que gros et de nouveau probablement doublé (ce que le montage tente de cacher), il donne encore un peu de lui-même avec fougue (bon certes on le voit jamais courir, là ou il piquait un bon sprint dans
Le Prix du sang) et ne passe pas son temps planqué dans l'ombre. Mieux : il a beaucoup de dialogues et on le voit bel et bien jouer lors de plans fixes sur son personnages (dont un plan "yeux" Leonesque qui revient 15 fois en 5 minutes), ce qui nous vaut même quelques grands monologues à la sauce Steven. Parfois, il sourit, quand par exemple il veut chopper une nana ou quand il prend son air narquois qui veut dire « je vous emmerde » ou « je vais vous casser la gueule ». C'est un peu ça, l'expression et la communication selon Steven. Steven Seagal s'en sort donc correctement, ce qui est regrettable c'est qu'on le voit finalement assez peu malgré son implication dans l'intrigue. On attend parfois un bon quart d'heure avant qu'il réapparaisse, en général pour casser quelques bras.
A dangerous man est plutôt généreux en action. Les bastons avec Steven sont jouissives même si elles sont souvent trop courtes (Steven expédie ses ennemis aussi facilement que rapidement). Guerre des gangs oblige, le récit est riche en gunfights, surtout la dernière demi-heure, ou ça finit par flinguer non-stop jusqu'à ce que Steven choppe le grand bad guy et lui inflige des sévices dont lui-seul à le secret puis ne fasse tout exploser (l'image de Steven marchant tranquillement au ralenti alors que tout explose derrière lui, autre grand classique de son cinéma). Quelques tentatives kitsch d'émotions (avec zolie musique au piano) et un peu d'humour, mais le tandem avec le jeune russe tourne court et n'est pas du tout exploité ; Steven préfère la jouer en solo et se taper la gonzesse, ce qui est tout à son honneur.
Si l’on excepte les choix de montage craignos (notamment des ralentis laids), la réalisation est honorable, la photo soignée, et certains plans en jettent carrément. Comme dans
Le Prix du sang, la musique semble parfois décalée mais c’est ici moins volontaire. Ecrit et réalisé par Keoni Waxman, auquel on doit plusieurs séries B (dont
Sweppers avec Dolph Lundgren et un biopic sur Anna Nicole Smith) et
The Keeper encore avec Steven car tourné dans la foulée,
A dangerous man est plutôt bien foutu. Aucune cohérence dans l’intrigue, beaucoup de scènes inutiles (le défilé de nanas à moitié à poils chez les méchants, les discussions de ces derniers pendant qu'ils mattent...), le scénario n’est guère intéressant et l’on s’ennuie rapidement lorsque Steven n’est pas à l’écran, ce qui est hélas le cas pendant la moitié du temps. En revanche, quand Steven revient, c’est le panard.
5,5 / 10